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Le cañón de Juanambu

Dia 6 : lundi 06.11.17

Alleeezzz changement de région ! El Nariño le retour !!! Les indigènes ne veulent toujours pas nous laisser passer... Pas de soucis, nous ferons peut-être un détour mais nous atteindrons le sud de la Colombie. Cette nouvelle semaine commence donc par 16h de voyage, et en sauts de puce s'il vous plaît : Objectif Pasto !

D'Ibague à Buesaco en sauts de puce

Le bus de nuit c'est génial, ça permet de dormir pendant qu'on avale tranquillement les kilomètres. C'est la meilleure solution pour nous d'optimiser les déplacements, sauf quand le chauffeur en décide autrement... Avec une conduite assez sportive sur une route pas toujours propre (dans un bus de 50 places clim' à fond), les 6h de nuit reliant Neiva à Mocoa ne nous permettent pas vraiment de nous reposer : sauf visiblement pour Fred, capable de dormir paisiblement alors qu’en pleine campagne il ne ferme pas l’œil de la nuit ! A Mocoa, nous avons à peine le temps de prendre un café qu'on nous propulse dans un nouveau mini bus pour la dernière ligne "pas droite du tout" ! Le clou du spectacle de ces longues heures de transport : la traversée des 3 cordillères, occidentale, centrale et orientale, qui se rejoignent entre Mocoa et Pasto pour former la mythique Cordillères des Andes !

A travers la Cordillère des Andes

On emprunte ainsi le fameux "Tramplin de la Muerte" : cette fabuleuse piste très sinueuse qui serpente dans ces splendides montagnes sauvages, isolées de tout, encaissées, au milieu d'une brume qui laisse parfois entrevoir un petit coin de ciel bleu. Quel décor ! C'est assez incroyable... Tout comme les dénivelés qu'elle avale : nous montons jusqu'à 3200 m d'altitude pour accéder au pied du páramo, cet étage climatique typique des pays tropicaux Andins, caractérisé par une végétation spongieuse et l'absence d'arbre ou de pluie ! Comme son nom l'indique, cette route a la mauvaise réputation d'être très dangereuse et de nombreux accidents mortels s'y produisent régulièrement à cause de glissements de terrain. On les imagine très facilement vu le précipice à quelques centimètres de nos roues, l'étroiture et l'état de la piste par endroit, et les pluies qui peuvent s'abattre par ici ! Mais tout danger est écarté car le beau temps est avec nous et le jeune pilote conduit son véhicule d’une main de maître... Merci à lui ! Si nous n'étions pas collés aux fenêtres pour admirer ces paysages incroyables et repérer au passage quelques belles cascades à explorer, nous aurions même pu nous endormir paisiblement. Objectif Pasto réussi et de très belle manière !

Dans le dernier bus menant à Pasto, après une belle nuit à cavaler

Cette cavale, aussi synonyme de nuit blanche, nous force au repos pour cette première journée à Pasto. Nous prenons tranquillement nos repères dans cette ville d’altitude, où la végétation est rase, le soleil plus intense, le volcan Las Galeras imposant et les montagnes omniprésentes. Nous nous remettons donc de nos émotions : Fred gère les vidéos et Google Earth, Anaïs les photos et tous nos contacts, et de mon côté je prends le temps d'écrire l’article précédent...

Le soir nous rencontrons Tarik, le seul canyoneur chevronné du département. Tarik accueille notre expédition dans une grande générosité autour de quelques bières. Ca faisait longtemps que nous avions envie de le rencontrer. Il connait beaucoup la région, il a repéré de nombreuses cascades (sans nous dévoiler tous ses secrets) et il nous aide déjà pour nous installer.

On décharge le Tuktuk !

Dia 7 : mardi 07.11.17

Avec de nouveaux contacts en poche, amis de Tarik, nous voilà déjà repartis en minibus parce qu'on est déjà trop en manque de transport ! Non, plus sérieusement, d'après nos amis ici en Colombie, il faut absolument que nous nous rendions à Buesaco et dans la vallée du Juanambu. Deux canyons majeurs ont été ouverts dans cette région par Tarik. Le genre de canyon ludique que l'on recherche, aquatique, sculpté dans une belle roche, avec des vasques, des toboggans et des jumps ! Selon eux, il en resterait plein à ouvrir dans cette vallée et c'est bien là notre principale motivation !

Depuis Pasto, nous passons 2h dans un "carrosse de pape" (sorte de pickup équipé d’une cabine réhaussée à l'arrière) pour rejoindre le village de Buesaco, perché à 1900m d'altitude sur une crête un peu pelée, comme les sommets qui l'entoure : changement de décor pour des montagnes arides mais non moins impressionnantes ! Étonnant vue la pluviométrie locale…

Nous sommes tellement impatients... Nous posons les bagages dans un joli petit hospedaje et prenons le premier tuk-tuk (mototaxi) en direction du cañón de Juanambu pour peaufiner le repérage !

A Buesaco les prix sont vraiment bas, mais à priori la qualité de la nourriture aussi : si tu veux manger autre chose que du poulet frit et des frites à l'huile, bon courage... Mais peu importe, notre appétit est aujourd'hui tourné vers ces montagnes surplombant le Juanambu ! Cette rivière de kayak est magnifique et l'excitation de trouver un canyon s'y déversant est palpable. Les yeux grands ouverts, nous remontons une piste que l'on avait repérée auparavant et qui recoupe plusieurs vallons. C'est très beau mais... C'est plutôt sec ! Le constat est amer et il nous faut faire demi-tour pour avoir une chance de regagner le village avant la nuit, et donc sans avoir mis la main sur la perle... Un peu de déception ce soir car nous espérions mieux comme repérage ! C'est certain, il va falloir se faire aider par les locaux... Les chemins et les pistes sont trop rares ici et parcourir ces immenses versants de montagnes à pied pour nos repérages nous prendrait des semaines ! Sans parler des contraintes d'accès liées aux cultures illicites de coca qui, selon nos amis, sont omniprésentes dans ce département, il vaut donc mieux savoir où nous pouvons mettre les pieds...

Vue sur notre village=crête de Buesaco

Dia 8 : mercredi 08.11.17

Miguel, ami de Tarik et guide de raft sur le Juanambu , nous prend sous son aile et nous emmène à l'intérieur du Parc Juanambu pour continuer nos prospections. Notre jeune local nous apprend beaucoup de particularité sur la nature colombienne qui nous entoure et nous guide aisément au milieu de ce paysage aride et broussailleux. Nous le suivons la tête dans la broussaille. Il a l’œil pour repérer le moindre animal qui s’échappe. Nous observons un « basilico », ce gros lézard bien dégourdi qui est capable de courir sur l’eau. Nous goûtons le piment sauvage, le basilic sauvage, et même les fleurs. Notre Miguel s’avère être, non seulement un jeune homme curieux de son pays, mais aussi un véritable botaniste ! Mais je ne suis pas sûr qu'il comprenne bien nos envies d'ouvertures ! "En fait vous voulez travailler ?" a-t-il même lâché à un moment donné.

Il nous faut une bonne partie de la journée à marcher aux côtés de Miguel pour constater les difficultés à ouvrir quelques choses d'intéressant par ici. Quelle déception, quelle frustration ! Nous rebroussons chemin en commençant à réaliser que nous nous sommes peut-être trompés de zone de prospection, qu’il faudra chercher ailleurs. Pourtant ces paysages sont si envoûtants, quel dommage.

Le majestueux cañón de Juanambu

Illustre déception ...

Pour sauver la journée, Miguel nous propose de descendre le Mozamouras avec lui, un des deux fameux canyons super ludiques et rares ouvert par Tarik, mais la pluie menace sur ce grand bassin versant, et Dieu sait combien elle peut être sévère. La proxima vez... Décidément tout tombe à l’eau. En cette fin de journée, nous rodons dans le Parc en attendant de dégoter un pickup qui nous remonte.

Nous le savons tous les 3, cela fait partie du jeu, mais la frustration grandit dans l'équipe ! La tension est palpable... Heureusement nous savons malgré tout profiter du moment présent, des naranjas fraîchement cueillis par Miguel, de ces paysages encaissés à couper le souffle et des petits moments de rigolades entre amis qui ne manquent pas !

Descente de Fred dans la première cascade de 30m

Dia 9 : jeudi 09.11.17

Cette fois nous y sommes ! Rien ne pourra plus nous arrêter... Aujourd'hui nous ouvrons un nouveau canyon : Las Delicias ! Un petit canyon sauvage que l'on peut apercevoir depuis notre village-crête de Buesaco. Miguel soupçonne l'existence de quelques cascades sur cet affluent du Hijaui mais il n'y a jamais mis les pieds et encore moins les cordes ! Il ne nous en faut pas plus pour satisfaire notre curiosité et surtout combler cette frustration grandissante... Petit rappel : 9ème jour ici et toujours pas d'ouverture !

La préparation est simple et efficace au petit matin : on embarque de quoi poser plus d'une vingtaine de relais et des main-courantes de l'espace... Je vous l'ai dit, rien ne pourra nous arrêter ! On est blindés ! En même temps nous ne savons pas exactement ce que l'on va trouver comme roche, ni le débit présent dans cet encaissement. Alors mieux vaut être prudent, lourds certes, mais prudents !

Après un bon petit dej' et chacun 1 demi litre de jus de maracuya (fruit de la passion), nous rejoignons Miguel et un tuk-tuk nous amène tranquillement sur la piste coupant Las Delicias. Avant de descendre, l'envie est plus forte que nous, nous remontons le long du torrent pour être sûrs qu'aucun ressaut intéressant ne nous attend plus haut... Nada ! Le débit est plutôt petit, 40l/s, parfait pour une ouverture, et nous trouvons une roche dure, déjà croisée lors de nos repérages, certainement de type granitique, verdâtre, peut être avec de la serpentine ? Le perfo en tremble déjà dans son sac étanche ! C'est parti !

Avant de rentrer dans l'eau, un paysan passant par là nous souhaite bonne chance et nous conseille de faire attention aux vivoras, les serpents mortels qui rodent à cette altitude. Nous devrons nous méfier du mataganado (le serpent corail tueur de bétail) et du gigantesque « Talla X » aux couleurs forestières. Ok... Ça met dans l'ambiance... Miguel en rajoute une bonne couche devant le premier petit ressaut sous la piste : « Ils peuvent nicher là, et là. » prévient Miguel, « Méfiez-vous aussi sous les racines et dans les petits creux de roche. » . Ok... Ça fait presque flipper maintenant ! La prudence est donc de mise : les premiers coups de machette et les premiers appuis se font en observant tout ce qui nous entoure attentivement. Nous ne pouvons donc pas rater les ordures en tout genre dans les premiers remous du canyon, une vraie décharge ! (Normal, le cours d’eau passe sous une piste, c’est trop tentant de tout jeter).

Au premier plan : la fleur "borrachera", aux propriétés hallucinogènes

Mike gère les amarrages naturels

Nous nous frayons un passage assez facilement dans la végétation, et quelques désescalades plus loin nous trouvons une première cascade. Les rayons du soleil passent... Cool, ça s'encaisse un peu ! En rive droite un arbre n'attend que notre corde pour nous faire descendre. Les amarrages naturels ont évidemment la priorité dans nos ouvertures ! Nous trouverons ainsi 7 vraies cascades (dont une de 32m et une de 35m), entrecoupées de marche et de désescalades. C'est à la fois ouvert et encaissé par moment, mais c'est vraiment dommage que les quelques obstacles ne s'enchaînent pas. L'ambiance est sauvage. A la fin de nos cascades, un champs de tomate de árbol (de la famille des kakis) nous approvisionne jusqu’à la sortie de la première ouverture de Canyon y Machete 2017. En tout cas c'était la première pour moi en Colombie, et je l'espère la première d'une longue liste !

Au fait vous savez pourquoi Las Delicias ? Et bien nous non... Mais peut-être parce qu'au départ de chaque grande cascade que ce canyon nous a offert, de gros arbres, bien ancrés par leurs énormes racines et parfois même entourant la roche, se trouvaient "délicieusement" bien placés pour nous servir d'amarrages naturels... Rive droite ou rive gauche ? Actif ou hors de l'eau ? Nous avions même parfois le choix... On n'aura donc laissé aucune trace de notre passage dans ce canyon... Tant pis pour le perfo, il faut savoir s'incliner devant la nature !


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