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Allez le Toy, réveille-toi, on décolle !

J’ignore d’où nous avons puisé cette force mais il a fallu nous imposer de rester « quelques jours » à Cartago, quelques jours qui se sont transformés en une semaine assez immobile mais nécessaire pour la construction officielle de notre projet. Petits pas par petits pas nous avançons en nous libérant de tâches et en en découvrant de nouvelles ! Cette semaine nous nous sommes particulièrement penchés sur la formation que nous souhaitons mettre en place. Nous avons aussi tenté de nous rapprocher du Ministère du Tourisme pour leurs donner un coup de main sur la mise en place d’une norme régissant l’activité canyoning naissante dans le pays. Nous avons fait de la pub pour notre future structure puis nous avons réfléchi à une organisation possible des secours canyon en Colombie. Nous avons continué le lexique (infini) des termes spécifiques au canyoning avec leur correspondance en espagnol. Ouh, j’ai la tête qui fume rien que de repenser à tout ça, et c’est loin d’être fini ! Nous avons aussi cherché d’arrache-pied des cartes plus précises pour nos explos et … on a d’ailleurs trouvé mieux ! Les cartes militaires IGM en ligne d’Agustin Codazzi nous donnent d’assez bonnes précisions sur les réseaux hydrographiques du pays ET nous avons découvert l’infini pouvoir d’Apple : Eh oui, les images satellites de l’iphone sont 10 fois plus précises que celles de GoogleEarth ! Ça vous en bouche un coin n’est-ce pas ? A nous aussi ! Quel grand soulagement de retrouver la vue grâce à ces images nettes ! Que d’envies d’explorations naissent en nous !

Dans tous le respect du mantra « un mental relaxé est un mental créatif », nous nous sommes accordés quelques petits moments de repos cartaguenois, entre deux demi-douzaine d’heures à pianoter sur l’ordi ! Cartago est en fête, le mois de décembre est arrivé, les enfants sont en vacances et c’est le bronx dans le barrio ! Ils se poursuivent à coup de bombes à eau colorée (l’une d’elles a projeté des éclats de rose sur l’ordi de Fred, pour le distraire de tous ces nœuds au cerveau !). Les rues témoignent de leur combat, jonchées des petites poches plastiques qui volent au vent. Les plus coquins se procurent de bonnes doses de poudre à pétard (illégale d’ailleurs, car il y a déjà eu trop d’accidents) et se réjouissent de foutre la trousse à quiconque croise leur chemin. Les plus artistes colorent les rues de grands dessins de Noël à la craie représentant des cloches, des sapins, des cadeaux et … des bonhommes de neige qui ne risquent pas de prendre vie ici ! Pendant ce temps les adultes se délectent d’une musique à fond dont profite tous le quartier à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit : autant vous dire que notre mental passe assez vite de « relaxé » à « stressé », surtout quand on tente de dormir, en vain, les 23h passées, le cœur rythmé au BOUM BOUM BOUM du voisinage ! Estela, qui nous héberge, le voit d’un œil bien plus tranquille : « Quelqu’un qui n’arrive pas à dormir à cause de la musique, eh bien, c’est qu’il n’a pas vraiment sommeil tout compte fait ! » C’est vrai que nous envions ses pouvoirs de s’endormir à n’importe quelle heure, peu importe le tintamarre ! Sages paroles … Demandez à Fredo, des cernes jusqu’au bas des joues, le visage pâle avec son air de somnambule, s’il est d’accord !

En revanche, les petits concerts d’été de Cartago sont bien plus agréables ! Le Festival des Arts de Cartago a mis sur le devant de la scène, le temps d’une soirée, les talentueuses voix de la ville. Cette nuit-là nous avons pu profiter des talents musicaux et rythmiques d’Uva et de son groupe.

Le 8 décembre nous impose une pause dans nos démarches administratives : nous fêtons l’Immaculée Conception. Depuis quelques jours les maisons ornent leurs fenêtres et les pieds du mur de plusieurs petites lanterne faites maisons. Une tradition de plus en ce mois de Décembre. L’explication ne tarde pas à faire suite. Nous découvrons alors que le 8 décembre, au soir, les bougies sont à l’honneur du « Dia de las Velitas » : le jour des petites chandelles ! Voici l’occasion pour nous d’une escapade nocturne à Quimbaya, une ville à une demi-heure de trajet de Cartago. Nous nous y rendons en moto, et nous avons bien fait : une foule inquantifiable s’y rends aussi ! Aussi nous profitons de l’avantage du deux roues pour remonter ces kilomètres de bouchons jusqu’à la ville et nos yeux scintillent devant toutes ces lanternes qui apparaissent petit-à-petit, minutieusement confectionnées par les habitants du village. Le « Festival de Velas y Faroles » de Quimabya est à la hauteur de sa réputation : l’ensemble du village est plongé dans l’obscurité et brille par les bougies de centaines de lanternes de vitrail en papier monopolisant chaque recoin de rue ! Plus de motos, plus de voitures, plus de bruit ! Un calme religieux nous permet de nous délecter de cette vue scintillante et nous sommes parcouru d’un étrange sentiment de repos.

Les lanternes faites maisons scintillent dans les rues éteintes de Quimbaya

Dimanche 11 décembre 2016 : Il fait une chaleur étouffante. Mon cerveau ne réponds plus, je ne peux plus voir l’ordi, j’ai envie de bouger ! Notre plan d’évasion n’est pas tout à fait terminé mais, en attendant, je ne peux pas me résoudre à rester enfermée un jour de plus ! Béni soit Juan Pablo qui arrive justement ce dimanche et nous prête sa moto !

  • Fredo, tu vas pas le croire, on-a-la-moto ! On va où ? On va où ?

Fred reprends automatiquement son ordi et se met sur GoogleEarth en quête d’une destination dominicale, à ma grande impatience.

  • Non mais Fred stp, on part juste à l’improviste, changer d’air, prendre le soleil, voir du pays !

Nous voilà à cheval sur cette moto descendant le département tout en longueur du Valle del Cauca, les

yeux grands ouverts sur le Cordillère Occidentale, croisant à contre-sens ces monstres de « trenes de caña », des camions à 3, 4 voire 5 remorques chargées de canne à sucre. Le département le plus producteur de canne à sucre du pays est en pleine récolte !

La moto nous conduit d’elle-même, tiens donc, jusqu’au-delà de Bolivar, à 1h30 au sud de Cartago, zone encore inexplorée par notre équipe Canyon Y Machete.

Nous voilà face à Marucha, en pleine contemplation, nous relatant les folies de Jérôme ! Alors c’était elle, dont Juan Pablo et Jesus, les frères de Monica, ressentent encore l’adrénaline ! Marucha est une cascade de 140m équipée puis descendue par Jérôme en 2014. Dans sa grande générosité, il a invité les frères de Monica, quasi novices en la matière, à participer à cette grande première ! Ça me fait rire rien que d’y penser ! C’est que je n’aurai jamais l’idée de proposer, en guise de quasi premier rappel, une verticale de 140m ! Pour vous expliquer un peu plus le contexte : cette année-là Jérôme s’est retrouvé en haut de cette cascade à poser le premier relais, inaugurant ainsi la première descente en rappel de la grande cascade de Marucha. Notre équipe descend d’un ressaut d’une dizaine de mètres pour se rapprocher au plus près du vide et poser un deuxième relais. Dans l’idéal, il va falloir percer 3 ou 4 relais de plus pour atteindre le pied de la cascade. Le groupe récupère la corde du haut sans plus attendre, mettant fin à toute idée de remonter et imposant donc, au groupe novice, la descente de cette immense parois. Mais le perfo décide de rajouter un peu de piment et, une fois le deuxième relais percé, à 130m du sol, la batterie ne l’anime plus. J’en ai une sueur froide dans le dos rien qu’en pensant à Jérôme, dont la solution unique a dû apparaître comme une évidence :

- « Bon ben les gars, faut descendre d’une traite ! ».

Mon Dieu ça a dû prendre des plombes ! Sur cette longueur la corde est lourde et constamment tendue. Le poids d’une personne ne change en rien la tension de la corde. Sans visibilité sur le bas de la cascade, il est donc même impossible de savoir si la personne est bien arrivée jusqu’en bas ou pas. Les multiples frottements ont également dû être une menace à la résistance de la corde et nos participants peu expérimentés se rappellent encore de Jérôme, désespéré, leurs vociférant d’en haut de bien vouloir épargner la corde en la plaçant aux bons endroits. Mais bien entendu qu’après seulement une poignée de rappels, on n’est pas encore bien à l’aise ! Alors là, ajoutez en plus le vide, comme on dit dans notre jargon, le « gaz », et n’importe quel débutant perds son sang froid ! Chapeau à cette brave équipe qui s’en est sortie ! Je meurs d’envie d’avoir plus de détails sur ces péripéties de la part de Jérôme ! L’expérience n’a pas été si traumatisante pour eux, puisque, lorsqu’ils apprennent que nous avons été voir Marucha, ils nous réclament d’y retourner pour retrouver ces sensations d’aventures et de boule au ventre ! On va le faire ! J’en trépigne d’impatience ! Nous allons monter un « Camps Bolivar » pour équiper comme il se doit cette géante ! Nous profiterons au passage pour descendre le Chocho, la perle des trouvailles de Jérôme, un fabuleux canyon encaissé comme on en rêve, avec une dizaine de cascades qui s’enchainent, et une vue constante depuis les hauteurs de la Cordillère occidentale sur la verte plaine et sa voisine, la Cordillère centrale !

Au retour nous sommes fin prêts. Dopés à l’air frais, nous décollerons le lendemain avec notre sac Quechua de 50L plein d’amarrages et de batteries de perfo rechargées. Nous mettons le cap direction Salento pour concrétiser ces jours entier de repérages et de lecture cartographique !

Le lac artificiel Sarah BRUT est niché dans les hauteurs de Bolivar, Valle del cauca

Songez bien qu’après ces escapades en moto suivies de cette longue semaine d’inactivité, il va falloir nous refaire un ami : le TOY !


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